Les propositions du Centre d'Action Laïque pour l'Union européenne
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Égalité femmes-hommes/Égalité des genres
L’égalité entre les femmes et les hommes est l’un des objectifs de l’Union européenne. Originellement formulé selon des considérations économiques, ce principe phare s’est graduellement renforcé pour s’inscrire aujourd’hui dans un vaste champ de politiques publiques (gender mainstreaming).
L’Union européenne a développé ces dernières années une série de plans d’action stratégiques et de programmes de financements (1) afin de promouvoir l’échange de bonnes pratiques entre États membres et ainsi accélérer les résultats en termes d’égalité des genres. Au-delà de l’action spécifique de l’Union européenne, la campagne #MeToo a propulsé la parole des femmes dans l’espace public et éclairé plusieurs sujets d’importance auparavant délaissés par le monde politique.
En parallèle, les mouvements conservateurs et extrémistes ne cessent de grandir au cœur de l’Europe et visent la mise en place d’un programme réactionnaire contraire à l’égalité des genres. Dans plusieurs États membres, la question de l’égalité femmes-hommes a progressivement été remplacée par celle de leur "complémentarité", par la promotion de politiques natalistes et de family mainstreaming ainsi que par le renforcement de stéréotypes genrés dévastateurs.
Pourtant, de nombreux chantiers restent à améliorer en termes de parité. La violence à l’égard des femmes, l’écart persistant de rémunération entre hommes et femmes et le partage inégal du travail non rémunéré sont les trois problématiques liées à l’égalité des sexes les plus importantes pour les pays membres. La vie publique n’est pas épargnée par les inégalités entre hommes et femmes: ces dernières continuent d’être sous-représentées en politique.
La question de l’égalité de genre est tout d’abord une question éthique, de dignité humaine et de respect des droits les plus élémentaires. Mais elle est également une question économique: la réduction de 50% d’ici 2025 de l’écart entre le taux d’activité des femmes et celui des hommes pourrait ajouter près de 2,5 points de pourcentage à la croissance prévue pour les pays de l’OCDE.
Il est tout simplement inadmissible qu’en Europe, les femmes soient encore trop souvent considérées comme des citoyennes de seconde zone.
Dès lors, le Centre d’Action Laïque demande de:
- Agir résolument pour défendre et promouvoir les droits des femmes et l’égalité de genre dans l’ensemble des politiques de l’Union européenne.
- Veiller notamment au respect et à la mise en œuvre effective de la directive "Égalité de salaire entre hommes et femmes pour un travail identique (transparence des rémunérations et mécanismes d’exécution)", publiée au JO le 17 mai 2023
- S’engager à promouvoir la participation des femmes à tous les échelons des instances européennes, en ce compris aux postes à haute responsabilité.
- Inviter la Commission et le Conseil à poursuivre et renforcer leurs plans d’action stratégiques respectifs en faveur de l’égalité des genres à l’intérieur et à l’extérieur de l’Union européenne.
- Faire pression pour que les derniers États réfractaires ratifient la Convention d’Istanbul sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique; veiller, en coordination avec le Conseil de l’Europe, à la mise en œuvre effective de la Convention par les États membres.
- Adopter et mettre en œuvre la proposition de directive de "Lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique".
- Soutenir la mise en place d’un mécanisme de monitoring de l’État de droit, de la démocratie et des droits fondamentaux proposé par le Parlement européen; au sein de ce mécanisme, s’assurer que l’égalité des genres occupe une place de choix dans le processus d’évaluation et d’éventuelles sanctions.
- Porter une attention particulière aux femmes qui souffrent de multiples discriminations et promouvoir une approche intersectionnelle pour prendre en compte leurs besoins spécifiques (notamment ceux des femmes migrantes, femmes lesbiennes et bisexuelles, femmes transgenres, femmes souffrant de handicap).
Droits sexuels et reproductifs
Depuis le milieu des années 1990, les droits sexuels et reproductifs sont reconnus par la communauté internationale comme des droits humains fondamentaux qui protègent certains aspects les plus importants et les plus intimes de nos vies.
En vertu du droit international, les États membres de l’Union européenne sont tenus d’assurer à toutes les femmes des soins et des services de santé sexuelle et reproductive, accessibles, abordables et de bonne qualité. Il en va de leurs droits à la vie, à la santé, au respect de la vie privée, à l'égalité, à la non-discrimination et à celui de ne pas être soumises à la torture et à des mauvais traitements.
La situation en Europe est toutefois loin d’être satisfaisante. Si de nombreux progrès ont été réalisés au cours de la deuxième moitié du XXe siècle, les femmes restent confrontées à des dénis et violations généralisés de leurs droits dans ce domaine. Les lois et pratiques, sous-tendues par des inégalités et des stéréotypes de genre, continuent de porter atteinte à leur autonomie, à leur dignité et à leur intimité.
Pire, on constate une série de stagnations et de reculs, que ce soit en termes d’accès à la contraception moderne, à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) ou d’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle (EVRAS). Certains droits que l’on pensait acquis vacillent, alors que d’autres restent entièrement à conquérir. Les mouvements conservateurs se multiplient en Europe et partagent un agenda rétrograde commun: emprisonner le corps des femmes et étouffer leur émancipation, limiter les droits des personnes LGBTQIA+ et renforcer les stéréotypes patriarcaux.
Le Centre d’Action Laïque invite les futurs responsables européens à:
- Reconnaître les droits sexuels et reproductifs comme partie intégrante des droits fondamentaux.
- Agir résolument en faveur de la légalisation du droit à l’interruption volontaire de grossesse formulée à la demande des femmes.
- S’informer des obstacles persistants à l’accès à l’IVG dans les pays européens et à tout faire pour garantir ce droit en loi et en pratique.
- Veiller à ce que le refus des professionnels de santé de donner certains soins ne compromette pas l’accès des femmes en temps utile à des soins de santé sexuelle et reproductive, et en particulier à la contraception et à l’IVG.
- S’assurer que chaque État membre propose un accès à la contraception moderne abordable et disponible en pratique.
- A minima, garantir que les pilules contraceptives et abortives (du lendemain et plus tardives) bénéficient effectivement de la libre circulation dans l’ensemble des États membres.
- En cas de situation de crise (ex: confinement causé par une pandémie), faire des soins reproductifs dans le pays et à l’étranger une exception à l’interdiction de se déplacer.
- Respecter et protéger les droits des femmes lors de l’accouchement et garantir un accès de toutes les femmes à des soins de santé maternelle de qualité.
- Combattre les violences obstétriques sous toutes leurs formes.
- Garantir à toutes les femmes l’accès à des recours effectifs contre les atteintes à leurs droits sexuels et reproductifs.
- S’engager en faveur d’une éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle de qualité (EVRAS) dispensée à l’école publique par des professionnels formés. Cela implique d’encourager et de surveiller la mise en place de cette éducation par tous les États membres selon les standards internationaux conseillés. Cela implique également de soutenir les organisations de la société civile qui travaillent à la mise en place d’une telle éducation et s’attellent à promouvoir l’accès à la santé sexuelle et la réduction des MST/IST et le respect du consentement mutuel.
Droits des personnes LGBTQIA+
Face à la recrudescence des conservatismes politiques et religieux à travers l’Europe, le Centre d’Action Laïque demande aux institutions européennes de renforcer leur action en faveur des droits des personnes LGBTQIA+ et en particulier de:
- Adopter la directive horizontale anti-discrimination proposée par la Commission en 2008 pour enfin disposer d’une base législative claire concernant les discriminations sur base de l’orientation sexuelle dans tous les aspects de la vie quotidienne.
- Élargir le mécanisme européen d’évaluation de l’état de droit à la démocratie et aux droits fondamentaux; dans ce mécanisme, s’assurer que les droits des personnes LGBTQIA+ sont sérieusement pris en compte.
- Veiller à ce que les mariages et unions civiles entre personnes du même sexe, ainsi que les adoptions réalisées par un couple de même sexe, légalement faits dans un État membre, bénéficient de la reconnaissance mutuelle dans les autres États membres; introduire des recours en manquement contre les États qui ne reconnaissent pas un mariage ou union civile légalement contractés dans un autre État membre par deux personnes du même sexe, quelle que soit leur nationalité.
- Poursuivre et renforcer les initiatives prises pour faire progresser l’égalité des droits des personnes LGBTQIA+ dans l’Union européenne, en particulier son action contre le harcèlement en ligne développé avec les "géants du numérique".
- Promouvoir un environnement scolaire sûr pour les jeunes personnes LGBTQIA+ et les enfants de couples LGBTQIA+ et encourager une réelle éducation à la diversité des orientations sexuelles et d’identité de genre dans les programmes scolaires.
- Renforcer leur action anti-discrimination à l’égard des personnes transgenres et intersexuées, et de manière générale, renforcer la lutte contre les discriminations liées à l’identité de genre et à l’expression de genre; dans cette perspective, surveiller étroitement la transposition des directives (2) qui protègent indirectement ces droits par les États membres; dans cet esprit également, encourager les États à modifier leur législation pour respecter la dignité et l’intégrité physique de ces personnes. Cela implique de supprimer les procédures de stérilisation forcée et autres procédures médicales et psychologiques liées à la reconnaissance légale de l’identité de genre des personnes trans et intersexes.
- S’assurer que les États membres examinent avec justice et transparence les demandes d’asile des personnes LGBTQIA+ et octroient protection et asile aux personnes LGBTQIA+ persécutées ou qui risquent de l’être en raison de leur orientation sexuelle et/ou identité de genre.
- S’assurer que le Bureau européen d’appui en matière d’asile soutienne les États membres dans leurs démarches en leur fournissant une expertise pertinente sur ces questions ainsi que des informations sur les pays d’origine.
- Voir par exemple: l’engagement stratégique pour l’égalité des genres 2016-2019 publié par la Commission en décembre 2015; la création de l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes en 2005; l’adoption de la charte des femmes en 2010; le plan d’action sur l’égalité des sexes 2016–2020 adopté par le Conseil de l’UE en 2015; le programme "Droits, égalité et citoyenneté du cadre financier pluriannuel 2014-2020"; la résolution sur l’émancipation des femmes et des filles du Parlement européen.
- Directive 2004/113/EC and Directive 2006/54/EC