Pour l'Union européenne
La construction européenne a reposé sur l’idée forte que plus les États sont amenés à collaborer les uns avec les autres, plus le risque de la guerre s’éloigne. Cette recherche de l’intérêt mutuel et de la solidarité entre les États a garanti la paix entre États membres de l’Union depuis plus de 70 ans.
L’invasion de l’Ukraine par la Russie bouleverse la situation de l’Union européenne. L’Ukraine paie sa volonté de se rapprocher de l’Union européenne, et à terme de la rejoindre, d’une guerre brutale. Le régime russe a déclenché une guerre d’agression pour rétablir son empire, niant le droit de déterminer son propre avenir au peuple ukrainien, et aux autres peuples ayant dans la passé fait partie de l’URSS. Cela représente un défi aux principes fondamentaux sur lesquels l’Union européenne est bâtie: intégration ouverte à tous les peuples d’Europe, sur un pied d’égalité, sur la base de la liberté de choix. Les peuples ukrainien, moldave, biélorusse, etc. ont le même droit de choisir librement leur avenir que les autres. Au contraire, la Russie se fonde sur un déterminisme pseudo-historique, un nationalisme ethnique, une idéologie impériale et suprémaciste, antithèses des idéaux laïques et des valeurs de l’Union. L’Union a une responsabilité particulière envers les sociétés de ces pays. Elle doit poursuivre son engagement de long terme pour la société ukrainienne et des autres États européens qui veulent la rejoindre.
La guerre russo-ukrainienne a également mis en lumière les manquements et incohérences de la politique extérieure de l’Union, notamment en termes de dépendance envers des régimes dictatoriaux et expansionnistes. Ainsi, la dépendance au gaz russe a conduit des États membres à verser des sommes considérables à la Russie, finançant son effort de guerre. L’Union devrait être plus cohérente et limiter sa dépendance (matières premières, etc.) envers des régimes dictatoriaux et imprévisibles. Les pays de l’Union ont déjà constaté cette dépendance à leurs dépens lors de la pandémie de Covid-19.
Le système multilatéral et les règles juridiques qui régissent son fonctionnement sont des éléments essentiels pour garantir la paix dans le monde, prévenir les conflits et alléger les tensions ainsi que pour établir entre les États des relations équilibrées et partenariales. Afin d’éviter la mise en échec de ce système, l’Union européenne se doit d’accroître son implication et son influence. Ceci requiert notamment que l’Union soit irréprochable sur le plan des droits humains et du droit public international en général car il n’est pas acceptable que l’Union ou ses États membres s’érigent au plan mondial en défenseurs de ces droits s’ils prêtent le flanc à la critique dans la conduite de leurs politiques internes.
Le Centre d’Action Laïque demande dès lors de:
- Mettre fin à l’unanimité dans les décisions européennes en matière de politique extérieure en faisant usage des clauses passerelles prévues par le traité de Lisbonne.
- Démocratiser la politique extérieure de l’Union européenne en y associant encore davantage le Parlement européen, notamment dans la préparation, la négociation et la ratification des accords internationaux.
- Renforcer le réseau diplomatique européen et dès lors la capacité européenne de parler d’une seule voix et d’agir de concert dans les enceintes internationales.
- Faire des droits humains le fil rouge de la politique extérieure de l’Union européenne et la condition de la signature d’accords internationaux où l’Union européenne est partie.
- Intensifier son action en faveur de la relance des négociations internationales sur le désarmement nucléaire, contre la prolifération nucléaire et des autres armes de destruction massive; poursuivre les efforts contre la dissémination des "small arms" et trafic d’armes.
- Respecter les principes du droit international et en particulier de la Charte des Nations Unies en toutes circonstances, et les défendre dans la politique externe.
- Promouvoir les principes démocratiques dans la politique étrangère; poursuivre le soutien aux pays reconnaissant ces principes face aux régimes dictatoriaux, militaristes et expansionnistes.
- Dans le cas de crises graves et de conflits armés, agir en faveur du respect du droit international et des droits humains.
- Soutenir les efforts de la justice internationale.
- En coordination avec les États membres, réduire les dépendances de l’Union envers des régime dictatoriaux sur les biens stratégiques (matières premières, médicaments et produits médicaux…)
- Défendre le droit à l’objection de conscience, tel que reconnu en droit international, notamment en garantissant le droit d’asile d’objecteurs victimes de répression pour avoir refusé de servir dans les forces armées de leur État.